FRONTAL - TOMOFRONT

Project Leader :  L. PRIEUR

             BACTERIA  : F. VAN WAMBEKE

Activité hétérotrophe, production et numérations bactériennes.

 

 

STATION	CODE	Prof.	C.D. bact	PB Tdr	A.P.	Turn-over	Fass. A.P.	F-AA/PB
	n°Bt	m	x 10#.mlÑ£	 pmole.lÑ£.hÑ£	eq. gly nM	time (jours)	nmole.lÑ£.hÑ£	ratios en equiv C %
210	A-11	5	0,81	1,99	604	90	0,28	20,7
	B- 8	80	0,9	1,68	1395	130	0,45	39,4
	C- 7	120	0,43	1,03	585	87	0,28	40
	D- 6	141	0,68	1,04	668	143	0,2	28,3
	E- 5	171	0,87	1,34	1090	73	0,62	68
	G- 2	401	0,12	1,24	835	313	0,11	13
								
215	A-11	7	1	1,43	682	50	0,57	58,6
	B- 9	61	0,88	1,57	461	18	1,1	103
	C- 7	98	0,74	0,5	740	96	0,32	94,1
	D- 4	129	0,66	1,23	757	151	0,21	25,1
	E- 3	171	0,38	0,71	651	168	0,16	33,1
	F- 2	350	0,17	0,27	624	334	0,08	43,6
								
220	A-11	6	1,01	2,52	391	43	0,48	28
	B- 9	23	0,75	0,6	395	26	0,67	164,2
	C- 8	57	0,52	0,52	395	19	0,85	240,3
	D- 7	166	0,23	0,26	411	44	0,39	220,5
	E- 4	190	0,31	0,27	431	91	0,2	108,9
	F- 3	230	0,26	0,35	549	75	0,32	134,4
								
226	A-11	7	0,75	1,72	686	56	0,51	43,6
	B- 9	24	0,95	1,98	410	16	1,04	77,2
	C- 8	50	0,59	0,44	932	105	0,37	123,6
	D- 7	61	0,59	0,54	245	9	1,12	304,9
	E- 4	81	0,76	0,44	443	54	0,34	113,6
	F- 3	111	0,48	0,34	580	52	0,46	198,9
								
232	A-11	17	1,11	2,1	821	26	1,34	93,8
	B-10	40	0,59	0,45	358	25	0,62	202,5
	C- 8	54	0,85	0,52	505	20	1,07	302,5
	D- 7	84	0,81	0,87	617	41	0,62	104,8
	E- 4	98	0,83	0,38	502	30	0,69	266,9
	F- 3	169	0,35	0,16	757	241	0,13	119,4
								
238	A-11	42	1,17	* 1,6	347	27	0,54	
	B-10	41	1,04	* 2,52	291	18	0,69	
	C- 8	70	0,79	* 0,74	324	47	0,29	
	D- 7	84	0,42	* 0,24	485	285	0,07	
	E- 4	168	0,22	* 0,26	210	157	0,06	
	F- 3	256	0,18	* 0,25	133	258	0,02	

Tableau 1 : Numérations, activité hétérotrophe et production bactérienne								
	C.D. bact : Effectifs bactériens (10# bactéries.mlÑ£)							
	P.B Tdr. : production bactérienne : pmoles thymidine incorporée.lÑ£.hÑ£							
	A.P. : amines primaires dissoutes, en n mole équivalents-glycine.lÑ£							
	Turnover time : temps de renouvellement pour l'assimilation							
	     du pool des acides aminés (jours)							
	Fass AP. : flux d'assimilation en amines primaires (n mole.lѣ.hѣ)							
	* : valeurs non mesurées mais déduites, cf méthodes						²	

 

Les transferts de matière organique entre les bactéries et le phytoplancton dépendent fortement de l'état physiologique de la population algale. Dans un site tel que le front Liguro-Provencal la matière organique particulaire issue de la photosynthèse, fraîchement entrainée vers le fond et se trouvant alors dans des conditions de stress (limitation en nutriments, manque de lumière), doit donc certainement influencer, la biomasse, l'activité hétérotrophe bactérienne et sa production.

Le flux de carbone transitant chez ces organismes a été estimé par une mesure directe de production bactérienne (thymidine).

Différents substrats organiques peuvent être responsables de cette production. L'importance de l'assimilation chez les bactéries de la matière organique "labile", nécessairement récemment produite dans le milieu (libération de fécès, relargage d'excrétats) est estimée par mesure de l'activité hétérotrophe sur acides aminés.

 

Matériels et méthodes utilisés pour l'analyse des paramétres bactériens.

 

1 Comptages bactériens. (CD bact)

la technique utilisée est la suivante  9 ml d'échantillon sont conservés jusqu'au comptage dans un pilulier contenant 1 ml de formol à 20 % (vol/vol) filtré sur une membrane de porosité 0,2 µm.  Juste avant la coloration, un passage du pilulier à la sonde à ultra-sons (50 sec, alternance 50 %, puissance 2  45 watts) assure une homogénéisation de l'échantillon (dissociation des amas, remise en suspension des bactéries attachées sur les particules ou sur les parois du pilulier). La coloration au 4'6-diamidino-2-phényl-indole (DAPI, Porter et Faig, 1980) s'effectue sur 2 ml d'échantillon ou plus, directement sur la tourelle de filtration. (concentration finale de DAPI, 500 µg/l), pendant 7 min. Le comptage s'effectue ensuite automatiquement sur un analyseur d'images couplé à l'épifluorescence, dans la mesure où les bactéries sont suffisemment nombreuses, que leur fluorescence soit contrastée par rapport au bruit de fond du filtre et que surtout, il n'y ait pas trop de particules détritiques (Van Wambeke, 1988). Dans les cas contraires, les comptages sont effectués manuellement au microscope.

 

2. Activité hétérotrophe.

 

Elle est mesurée à partir d'incorporation de traceur acides aminés. La mesure du flux correspondante nécessite une mesure de la concentration naturelle de ce traceur dans le milieu, déterminé par dosage de composés représentatifs  les amines primaires dissoutes.

 

2.1. Dosage des amines primaires libres dissoutes (AP), déterminés en continu par fluorimétrie après dérivatisation avec l'orthophtaldialdéhyde selon la méthode de Dawson et Liebezeit (1981). Les résultats sont donnés en équivalents glycine (nM). Il est représentatif des acides aminés libres dissous mais aussi des petits peptides et des amines primaires. De façon générale, les acides aminés libres dissous représentent environ 50 % de ces composés.

 

2.2. Temps de renouvellement (turnover time TT-AA, en jours) des acides aminés libres dissous obtenus par la méthode d'incorporation d'acides aminés tritiés dans la matière particulaire. Il ne tient pas compte de la respiration. Une mélange d'acides aminés Amersham (activité spécifique 36 Ci/ mmole) a été employé a une concentration finale de 2nM (concentration trace) sur des échantillons de 40 ml d'eau  incubés pendant 2 heures à 15°C. La radioactivité est récupérée sur membrane Nuclepore 0,2 µm.

 

2.3. Flux d'amines primaires incorporé dans les bactéries (F-AP, nmole/l/h). Il est obtenu par multiplication du turnover rate (1 / turnovertime) et de la concentration en amines primaires. Il est représentatif de l'activité bactérienne hétérotrophe assimilatrice (fraction respirée non mesurée) exercée sur les composés dissous "labiles" , possédant à la fois du carbone et de l'azote, principalement les acides aminés. (Le mélange d'acides aminés testés contenant 4,9 atomes par mole en moyenne, 1 nmole/l/h assimilé équivaut à 60 ngC/l/h).

 

3. Production bactérienne (PB), mesurée par l'incorporation de thymidine tritiée suivant la technique de Fuhrman et Azam (1982). 20 nM (concentration saturante) de [méthyl 3H]-thymidine Amersham (activité spécifique 47 Ci/mmole) est rajouté à des échantillons d'eau de 20 ou 40 ml, le temps d'incubation est de 2 heures à 15°C. L'incorporation est mesurée ensuite dans le matériel cellulaire insoluble en acide tricloroacétique froid (10 %). Un coefficient de conversion permet de transformer la thymidine incoporée dans du matériel précipitable au TCA froid en production batérienne.

En l'absence de données actuellement dépouillées sur les biovolumes, on peut approximer la production bactérienne en carbone de la façon suivante  avec un facteur de conversion de 2 1018 cellule / mole de thymidine incorporée et 20 fg C / bactérie, 1 pmole thymidine/l/h équivaut à à 2 106 bactéries produites/l/h ou 40 ng C bactérien/l/h.

N'ayant plus de thymidine disponible lors de l'étude du profil de production bactérienne à la station 238, les données obtenues pour cette dernière ont été déduites par calcul à partir d'une mesure de production bactérienne effectuée avec de la leucine (Kirchman et col., 1986).

 

 

Résultats

 

 Les résultats présentés concernent 6 profils étalés de la côte à la divergence du large (figure 1). Pour chaque profil, les 6 profondeurs choisies (ABCDEF) correspondent, quand ils sont observés, à l'encadrement des deux maxima de chlorophylle, avec, pour chaque maximum, un point au début, un point au maximum et un point en dessous du pic.

Les résultats chiffrés de l'ensemble des paramètres sont présentés tableau 1.

Globalement les productions bactériennes (maxi = 2,5 pM/h), et le flux d'amines primaires incorporée dans les bactéries (maxi = 1,1 nM/h), sont représentatifs d'eaux oligotrophes, même pour la station la plus côtière ou les maxima de chlorophylle (figure 2). Les rapports (valeur maxi/valeur mini) est d'environ 15 pour la production, 55 pour l'activité hétérotrophe. Ainsi, les variations observées au sein d'une même station sont au dessus des erreurs expérimentales, et la comparaison de deux stations entre elles est possible car toutes ces stations ont été étudiées le matin vers 8h et sont donc toutes dans les mêmes conditions de rythme nychtéméral (pour les paramètres bactériens, ces variations sont couramment d'un facteur 2 à 3 au sein d'une même masse d'eau).

L'étude du tableau de corrélation des rangs de Spearman effectué sur 6 variables (CD bact,  TT-AA, AP, PB, F-AP, chlorophylle in vivo enregistrée sur la CTD à la fermeture de la bouteille) x 36 mesures (6 profils x 6 profondeurs) montre que les paramètres qui sont les plus liés (p < 0,01) à la chlorophylle in vivo sont les effectfs bactériens (R=0,91), puis l'activité hétérotrophe  (R=0.74) et la production bactérienne (R=0,72) celui qui l'est pas (R = -0.009) la concentration en amines primaires.

Le temps de renouvellement pour l'assimilation des acides aminés qui sont incorporés dans les bactéries est élevé dans l'ensemble, plus de 100 jours notemment pour les prélèvements profonds ou associés à de faibles biomasses chlorophylliennes. D'aussi fortes valeurs s'expliquent partiellement par les faibles productions également rencontrées sur ces prélèvements, mais certainement plus par le biais du rendement d'assimilation des acides aminés, non mesuré, mais qui peut atteindre des valeurs supérieures à 50 % (dans la littérature, les temps de renouvellement cités concernent plutôt l'incorporation = assimilation + respiration)  La majorité des acides aminés incorporés seraient donc en ce cas respirés et non pas assimilés, ce qui traduirait un très faible rendement de croissance pour ces communautés bactériennes.

L'activité hétérotrophe bactérienne montre des valeurs les plus élevées pour des stations 215, 220, 226, 232 ; au niveau du premier maximum de chlorophylle, mais aussi pour des prélèvements intermédiaires entre les deux pics. Celle-çi dépend plus de l'activité bactérienne que des concentrations naturelles en amines primaires, étant donné la corrélation forte (R=-0.92, p < 0,01) observée entre F-AP et TT-AA , et la faible corrélation (R=0.13, p > 0,05) de F-AP avec les amines primaires

L'étude des profils des productions bactériennes montre les valeurs les plus fortes pour les stations 210 et 215, même pour les points en profondeur et bien que les concentration en chlorophylle in vivo dans ces stations ne soient pas très élevées.

Dans les autres stations, surtout 220, 226 232 et 238, le maximum de production bactérienne est associé au premier pic de fluorescence, les valeurs diminuant d'un facteur 3 ou plus, même au niveau du second pic de chlorophylle, pour les autres points.

 Il semble donc, au vu de ces résultats, que dans les stades initiaux de l'enfoncement des algues dans la couche oblique, la production bactérienne ne soit pas favorisée mais qu'elle le soit plus tardivement (stations les plus éloignées de la convergence). Par contre, l'assimilation des acides aminés semble "découplée" de cette production bactérienne comme le montre les taux d'assimilation plus élevés entre les deux pics de chlorophylle (stations 226, 232), et la correlation faible, bien que significative (R=0,47, p < 0,01) entre le flux d'assimilation d'amines primaires et la production bactérienne.

La participation du carbone assimilé lors de la mesure du flux d'amines primaires (carbone labile) à la production bactérienne dépasse 100 % sur de nombreux prélèvements, notemment les profonds. Ceci peut être dû à une sous-estimation de la mesure de production. De nombreux biais existent et sont largement décrits en ce qui concerne les mesures de production bactérienne par la thymidine. Les facteurs de conversion thymidine incorporée-production bactérienne peuvent varier, notemment en fonction du volume moyen bactérien ; il existe des souches incapables d'incorporer la thymidine exogène...  

 De plus, nous n'avons aucune idéee de la concentration réelle en acides aminés libres dissous. De nombreux éléments, dosés dans les amines primaires,  ne seraient pas aussi facilement assimilables que ces derniers . Le flux F-AP pourrait donc être surestimé par ce bais.

En incubant 20 ml, nous n'avons mesuré que l'activité bactérienne des bactéries libres ou de bactéries fixées sur de petites particules représentatives d'un échantillon de 20 ml. Il a été montré que de nombreux brouteurs "accompagnent" le phytoplancton qui s'enfonce, l'activité bactérienne peut donc être également reliée aux processus de "sloppy-feeding" ou d'excrétion, et en ce cas les bactéries attachées sur les pelotes fécales ou les débris phytoplanctoniques seraient favorisées.

 

Dawson, R. & Liebezeit, G. 1981. The analytical methods for the characterization of organics in seawater. In  Marine Organic Chemistry. Evolution, Composition, Interactions and Chemistry of Organic Matter in Seawater. Duursma & Dawson (editors), Elsevier.

 

Fuhrman, J.A. & Azam, F. 1982. Thymidine incorporation as a measure of heterotrophic bacterioplankton production in marine surface waters  Evaluation and field results. Mar. Biol., 66  109-120.

 

Kirchman, D., Newell, S. Y. & Hodson, R. E. 1986. Incorporation versus biosynthesis of leucine  implications for measuring rates of protein synthesis and biomass production by bacteria in marine systems. Mar. Ecol. Prog. Ser. , 32  47-59.

 

Porter, K.G. & Feig, Y.S. 1980. The use of DAPI for identifying and counting aquatic microflora. Limnol. Oceanogr., 25  943-948.

 

Van Wambeke, F. 1988. Numération et taille des bactéries planctoniques au moyen de l'analyse d'images couplée à l'épifluorescence. Ann. Inst. Pasteur/Microbiol., 139  261-272.